Si tu peux prendre plaisir à anéantir
Ce qu’un autre tant d’années mit à construire
Ou arracher sous ses yeux le fruit de son labeur
Sans un remords et sans un scrupule ;
Si tu peux n’aimer l’autre que pour recevoir
Pour ta fierté, ton estime de toi et du pouvoir
Et pour ceux qui ne t’adorent pas
N’arborer qu’haines et mépris ;
Si tu peux briser honneurs et réputations
Pour seulement divertir ta cour
Et jeter en pâture à la rumeur avec délectation
D’humbles et honnêtes rivaux ;
Si tu peux ne chercher que faveurs des puissants
Si tu peux les flatter autant qu’ils te dédaignent
Si tu peux te complaire à être Muse du Diable
Pour espérer un jour un trône où t’asseoir
Si tu ne sais plus reconnaître l’intelligence
Pour toujours vénérer idiots et médiocres ;
Imaginer, ou seulement tes avenirs glorieux
N’aimer que ton reflet et celles qui y ressemblent
Si tu peux écraser sans la moindre pitié
Si tu peux être lâche et souiller l’innocence
Si tu sais être vile, si tu sais être folle
Et te vanter de tout ;
Si tu te satisfais de toute victoire facile
Ne t’allier qu’aux plus forts selon ton intérêt
Si par le mot valeur tu n’entends que richesse
Quand de la chute l’heure viendra,
Alors, Reine d’un jour, Déesse de pacotille
Revenue à ta condition misérable
Ouverts tes yeux bouffis de sanglots
Tu ne seras pas même un homme, ma fille
crédit photo : Culotte abandonnée – 2010, avec l’aimable autorisation de Johnny Collangette
Retrouvez aussi le même texte, lu à haute voix par Angèle Casanova et Olivier Savignat.
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