menuiserie

Une grande menuiserie ? Pas vraiment. Les enfants y allaient en courant, après avoir embrassé leur grand-mère, qui souvent faisait patience sur la table du salon. Ils franchissaient d’un bond la marche de la terrasse, slalomaient entre les arbousiers sur l’épais tapis d’aiguilles, dévalaient la petite colline au fil à linge tendu entre les immenses pins maritimes, évitaient de justesse les balançoires aux sièges jaunes, avant d’arriver devant les portes de l’atelier.

Des machines y usinaient le bois, dans les grands crissements des lames et des fraises contre les denses végétaux, sous l’œil vigilant et amoureux du grand-père, au milieu de la poussière, des copeaux, des odeurs de résine et de colle.

Les échelles étaient à gauche de la porte, les vélos suspendus à la droite, puis ensuite se déployait le royaume de l’ébéniste amateur, dont le grand établi de bois brut, riche de mille outils, l’armoire et sa petite sœur à tiroirs, le touret, la meuleuse, et un drôle de porte-avions qui trônait au milieu de l’ensemble.

De dégauchissages en rabotages, de tenons en embrèvements, de ciseaux à bois en papiers à poncer, à la perceuse ou au vilebrequin, sortaient du modeste atelier occupé à ses seuls loisirs tables de chevet, lits à tête, commodes, buffets, bancs, tabourets, cadres pour tableaux, horloges franc-comtoises, abri de jardin ou charpente… et jusqu’au bateau sur lequel leurs pères avaient navigué.

Quand les machines se taisaient, pour peu que le vent d’ouest chatouille les cimes, sous la main qui, avec passion, caressait l’âme lisse de la création, l’océan tout entier murmurait avec les petites têtes blondes une terrible admiration.


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